Tout est prétexte à l'adolescence pour rejeter des parents qui doivent relativiser et se dire que cela fait partie d'un processus d’autonomisation.
Une mère fringuée n’importe comment, un père trop vieux, rien ne va. Quoi qu'ils fassent, quoi qu'ils disent, quoi qu'ils soient, les parents ne trouvent plus grâce aux yeux de leur progéniture.
« Riche ou pauvre, prof ou menuisier, cadre sup ou femme de ménage, ça peut être tout et son contraire, observe Catherine Aimelet-Périssol, psychothérapeute et formatrice en logique émotionnelle. Les parents qui ont fait de leur mieux se retrouvent sur le banc des accusés, montrés du doigt. »
Il n’est pas si loin pourtant le temps où le petit garçon, la petite fille les regardaient pleins d'admiration et leur juraient un amour éternel. « Vous passez de dieu vivant à plus rien à l’adolescence, résume Patrick-Ange Raoult, psychologue clinicien et auteur d’un livre sur la honte à l'adolescence. C’est un mouvement naturel de désidéalisation. » Généralement, ce phénomène se produit vers douze ans quand le ou la préado est à la recherche de son identité et va trouver auprès de ses pairs, de nouvelles valeurs, de nouvelles références. « Ils arrivent à un âge où ils se transforment en profondeur, explique M. Raoult. Et ils remettent à plat tout ce que leur a transmis leur entourage. » Cela prend la forme de critiques exprimées de manière plus ou moins virulente. Comme on essuie une tempête, les parents essuieront les reproches en tentant de garder leur calme.
Tombés de leur piédestal, les parents s’interrogent sur l’attitude, la bonne distance à avoir. « Prendre du recul, ne pas y attacher d’importance, ce n’est pas si simple, estime Mme Aimelet-Périssol. Remis en cause, ils doivent assumer, donner de la valeur à ce qu’ils font, à ce qu’ils sont. » Blessés, vexés, se sentant trahis, il est parfois difficile pour eux de surmonter l’impression d’ingratitude qu’ils éprouvent.
« D’autant plus que les ados sont de fins observateurs et appuient là où ça fait mal, ajoute M. Raoult. Ils perçoivent l’écart entre les discours, les idéaux parentaux et la réalité des choses, ce qui entraîne de la honte chez eux. »
Dans une société qui met en avant – notamment à travers les réseaux sociaux –, l’image de parents modèles, il y a de quoi douter et ne pas se sentir à la hauteur. « Vous pouvez culpabiliser de ne pas être un parent exemplaire, d’avoir raté votre éducation, remarque Mme Aimelet-Périssol. Et si vous avez du mal à vous accepter vous-même, à considérer votre métier, alors vous contribuez au sentiment de honte de votre enfant. » Soucieux de ne pas entraver cette phase où le jeune s’éloigne, les parents resteront dans le dialogue sans chercher à se justifier ni à rappeler tout ce qu’ils ont fait pour lui. Un peu plus tard quand l’enfant sera devenu adulte, il posera un regard adouci et reconnaitra alors ce que sa famille lui a apporté de bien et de positif.
François Jeand’Heur
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