Notre expert
Attentes parentales: enjeux et déceptions

Annick Pochet, Thérapeute en psychologie systémique
Thérapie familiale, individuelle et de couple à Genève
https://therapeute-systemique.com/
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On déçoit toujours nos parents à un moment donné, comme nos enfants nous décevront forcément à leur tour.

Freud a beaucoup écrit sur le sujet. En effet, il explique que le bébé incarne la possibilité pour les parents, de réparer une partie de leur propre histoire de vie qu'ils considèrent comme ratée, "je ne vais surtout pas faire vivre à mes enfants, ce que mes parents m'ont fait vivre". Le bébé devient porteur d'une mission de réparateur.

Il symbolise également, l'idée de l'immortalité narcissique du parent, "il reste une part de moi, un prolongement de moi dans la vie de mes enfants". Il est le lien narcissique social entre les générations passées et celles à venir. Il est celui qui va assurer la continuité de la génération.

Le bébé, comme dit Freud, devra accomplir tous les rêves, tous les désirs que les parents n’ont pas mis à exécution, du fait des contraintes imposées par leur réalité.

Tout parent est un ancien enfant qui a subit des blessures, des traumatismes, des échecs, des frustrations, infligés par ses propres parents. Il sera donc porteur de ce passé qu'il va tenter de réparer à travers l'éducation qu'il va à son tour donner à son enfant. Et tout enfant deviendra alors le réceptacle de l'histoire parentale à réparer. Il devra se construire et débattre avec cette histoire imposée, tout en construisant la sienne au travers du prisme de sa personnalité.

Quand un parent demande à son enfant d'être un enfant sage, bien élevé, obéissant, ce n'est pas tant pour l'aider à grandir et se développer en acceptant les contraintes de la vie, c'est surtout pour permettre au parent de recevoir une image de lui-même comme étant un "bon" parent.

Car c'est l'enfant qui est le détenteur de cette validation. C'est lui, par ses comportements, ses fonctionnements qui va déterminer la valeur que se donne le parent en tant que "bon" ou "mauvais" parent. L'enfant va définir, par ce qu'il renvoi au parent, si ce dernier est un parent "aimant", "protecteur", "pédagogue"...

Combien de parents, face à une situation ou un comportement de leur enfant qu'ils estiment incompréhensible, se demandent "ce qu'ils ont raté" dans l'éducation qu'ils ont donnée?

Il est évident que la façon dont le parent va présenter la réalité, énoncer les interdits, poser les limites, sera tributaire du niveau de sa propre demande de réparation des ses expériences infantiles. Plus le parent agira en réponse à l’enfant qu’il a été, et non en réponse aux besoins réels de son enfant, et plus il sera en difficulté devant cet enfant. Evidemment si l’attente du parent est trop déçue, si le désir de réparation est trop fort, il entraînera tout un cortège de frustrations et de déceptions

Cela peut être un parent qui ne met pas de limites à son enfant ou qui va en mettre de façon tellement disproportionnée, qu'il va lui-même sortir de ses propres limites et en vouloir à son enfant d'attaquer son estime de lui quant à être un bon parent, dans son incapacité à réparer son expérience infantile d'échec.

Si malheureusement un parent a vécu l'expérience d'avoir été mal aimé, abandonné et qu'il attend trop que son enfant soit "une mère" pour lui, il vivra l'individuation et l'autonomie de son enfant comme un nouvel abandon. Ce sont les parents hyper protecteurs, les "mère poule", qui vont développer de l'hostilité envers leur enfant quand ce dernier va vouloir prendre son envol. Ils vivront cette séparation comme un échec, "comment ai-je élevé mon enfant pour qu'il est tant envie de partir loin de moi?".

Le "métier" de parent implique donc une grande quantité d'enjeux liés à la transmission et l'héritage que le parent veut laisser à son enfant et à la résistance que l'enfant va mettre contre ça. Pour certains parents, il est difficile de se dissocier de leur enfant. De le considérer dès sa naissance, comme un individu à part entière.

Il existe un outil assez efficace pour permettre au lien parent/enfant de trouver un équilibre. Cet outils est celui de la parole. Tant qu'il y a possibilité de dialogue entre les membres d'une famille, tant qu'il existe un espace de paroles où tout peut être dit, écouté et débattu, alors chacun pourra exprimer ce qu'il est et amener une perception et une compréhension nouvelle du sujet qui est abordé.

Il est parfois nécessaire de faire recours à une tierce personne qui permettra ainsi de créer un chemin indirect entre les mots et les émotions. Cela peut être un grand-parent, un ami, un oncle ou une tante...et si besoin, un professionnel.

Il ne faut donc pas laisser une situation s'enliser sans en parler. Il faut s'autoriser à dire les choses qui, parfois pour un parent, lui donne la sensation d'être un "mauvais" parent. Arriver à expliquer que ses pulsions de parents ont une raison d'être et comprendre celles de son enfant. Prenez donc le temps de parler, d'en parler et d'écouter.
      

Annick Pochet Thérapeute en psychologie systémique à domicile

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